Vous souhaitez publier une actualité, un communiqué de presse, une proposition d'emploi ou une autre information ?
Actualité
Cameroun : Les anciens de l’Enam dénoncent un défaut de qualité
Article
Publication : 14 / 06 / 2007
1611 Consultations
Issus de la promotion 1985, ils sont venus, vendredi, dans leur ancienne Ecole imprégner leurs cadets des défis qui les attendent une fois qu’ils seront en fonctions. C’était dans le cadre d’une conférence académique sur le thème : le défi de la qualité du service dans l’administration camerounaise.
Comment introduire une vision de production et de gestion de type privé dans l’administration publique ? Le pari est osé, reconnaissent les initiateurs de la conférence-débat à laquelle assistaient plusieurs centaines d’étudiants de l’Enam, sous la supervision de son directeur général, Benoît Ndong Soumeth. Mais “ l’administration publique camerounaise est à la croisée des chemins ”, soutient Alain Mekulu Mvondo, chargé de mission au secrétariat général à la présidence de la République et modérateur des débats. Elle subit, déclare-t-il, des pressions de toutes parts : les citoyens attendent une amélioration de leur cadre de vie, les acteurs politiques veulent l’amélioration de la gouvernance et de la démocratie, et les partenaires de développement exigent des résultats de gestion tangibles.
Seulement, “ le visage de l’administration camerounaise n’est pas des plus reluisants ”, poursuit-il, en s’inspirant d’un rapport du Programme national de gouvernance (Png). Il dénonce “ les lourdeurs et longueurs de procédures souvent qualifiées de fantaisistes, l’irresponsabilité, l’autoritarisme et l’insouciance de la hiérarchie administrative, le gaspillage des ressources matérielles et humaines… ”.
D’où l’urgence et la nécessité d’une réforme approfondie dont la problématique peut avoir un début de réponse avec ladite conférence-débat. Ainsi, explique Paul Mbonjo Ngolong, cadre à la Mission d’aménagement des zones industrielles (Magzi), le concept de la démarche qualité est d’abord d’essence privée avant de s’introduire progressivement dans l’administration publique autour des années 80. La qualité étant définie comme l’ensemble des caractéristiques et des aptitudes d’une entité qui permettent à celle-ci de répondre aux besoins d’utilité, selon l’International standard organisation (Iso).
Le nouveau management et le contexte de la mondialisation voudraient donc que le service public (services régaliens ou de base et les services associés) s’approprie cette démarche qualité, “ sous peine de se faire évincer ”. Dans ce sens, la démarche qualité dans l’administration publique camerounaise doit reposer sur un certain nombre de piliers, dont la précision de l’offre de service avec l’obligation de rendre compte. A ce propos, P. Mbonjo Ngolong fait remarquer, pour le regretter, que cette “ administration a été longtemps une administration de souveraineté rendant compte exclusivement au chef de l’Etat ”.
Il faut améliorer le processus de production. Le conférencier regrette également que l’administration camerounaise, au lieu de se remettre en question, “ s’est plutôt engluée dans la routine ” et dans un management mécanique. Il faut également, poursuit-il, développer la mesure, c’est-à-dire, passer à une administration qui vise des résultats tangibles. Enfin, l’administration publique doit développer et consolider le management de qualité qui consiste à faire participer tous les usagers du service public au processus de prise de décision.
Mais, se réserve Paul Mbonjo Ngolong, la réforme prendra du temps, parce qu’il faudra faire la mue de certaines de nos valeurs culturelles, pour nous approprier efficacement la démarche qualité qui, soutient-il, “ peut aider à lutter contre la corruption, impulser la culture de la responsabilité, légitimer l’action administrative et garantir aux usagers un bon service au moindre coût ”.
Mais les obstacles culturels à la performance de l’administration publique camerounaise que les futurs fonctionnaires se doivent de concilier ou de gérer avec tact sont légion, estime Alain Mekulu Mvondo. La croyance ou l’existence de la sorcellerie ; la logique communautariste ; l’existence ou la croyance aux soi-disant réseaux de succès ; la perception du lieu de travail comme étant essentiellement un lieu de conflit ; le principe de redistribution sociale après les nominations qui oblige les hauts fonctionnaires à s’accaparer des biens publics pour assurer leur réputation ; la notion de temps qui est perçu différemment (le temps qui dure est pour certains Camerounais l’occasion de raffermir les liens sociologiques ou claniques alors que d’autres n’y trouveraient que du gaspillage, le temps étant de l’argent).
Mais l’assistance croit savoir que le problème de la qualité du service dans l’administration camerounaise pourrait être un problème de génération de gestionnaires et surtout du régime actuellement aux affaires. Ce que ne partage pas Elie Njomnack, cadre d’administration, qui trouve la cause des dysfonctionnements actuels dans le gel des recrutements à la fonction publique, et surtout la baisse des salaires.